Pourquoi vous êtes-vous présentée en octobre 2011 ?
Comme tout le monde, j’ai suivi les événements. J’habitais à Dubai à l’époque. Avant la révolution je ne votais même pas, d’ailleurs dans ma famille personne ne recevait sa carte électorale. Je savais bien que nous étions dans une dictature, que nous étions oppressés. Je connaissais quelques noms d’opposants. Avec la révolution je me suis demandée comment agir : est-ce qu’il fallait mieux aller dans la société civile ou dans les partis politiques. Et finalement je me suis dit que puisqu’il n’existait pas de cadre pour les libertés il serait difficile pour la société civile de travailler. Alors au printemps 2011 j’ai adhéré au CPR parce que le discours et les valeurs du parti me plaisaient.
Finalement la veille de la clôture du dépôt de candidature des amis m’ont poussé à déposer mon dossier. C’est à Tunis qu’il a été décidé de me mettre tête de liste. Je n’avais rien planifié. Si je l’avais fait je pense que j’aurais eu peur. Mais j’y suis tout de même allée parce qu’il y avait des choses à faire et que l’on ne pouvait pas rester les bras croisés.
Quelle a été votre expérience de ces trois années écoulées ?
D’un point de vue personnel l’expérience a été difficile mais j’ai eu un grand soutien familial. J’ai travaillé comme constituante et également comme conseillère à la Présidence. Je n’avais rien planifié. Et la pression médiatique a été difficile. Cette expérience m’a demandé beaucoup d’adaptation.
Mais dans l’ensemble je suis satisfaite. La Tunisie a réalisé les premiers pas de la transition. Malgré tout la Constitution est consensuelle et c’est un bel accomplissement. La Tunisie a su profiter de l’homogénéité de sa société.
Et il y a eu de la maturité de la part de la classe politique malgré tout.
Certes, d’un point de vue social et économique les choses n’ont pas avancé aussi rapidement, surtout que les attentes des citoyens étaient fortes. Mais le fait que l’on soit en période transitoire rend la situation instable, mais maintenant que nous avons un texte et que des élections transparentes et démocratiques vont avoir lieu je pense que les tensions vont baisser et les différends s’atténuer.
Si de l’extérieur on peut avoir l’impression que l’ANC a trop duré il faut savoir que ce temps était important : nous sommes arrivés avec des différents et des préjugés mais petit à petit un climat de confiance s’est instauré. Nous sommes passés par un apprentissage qui était nécessaire. Nous nous sommes rendu compte que les partis politiques avaient un large spectre et qu’il pouvait y avoir des affinités personnelles. Ceci s’est vu à travers le travail dans les commissions qui nous on rapprochés. E finalement lors des journées importantes, comme le jour de l’adoption de la Constitution par exemple, nous avons vu que le consensus est possible. Il faut simplement garder ça en tête.
Pourquoi ne vous présentez-vous pas en octobre 2014 ?
Pour les élections de 2014 je vais passer beaucoup de temps à travailler comme membre de l’équipe de campagne législative et présidentielle. Je ne me représente pas, il me fallait une pause. Et je pense que l’alternance est bonne en politique. Je pense aussi qu’il est bon que des personnes restent investies dans le parti pour éviter les scissions que l’on a connues jusque là.
C’est un choix personnel que j’ai fait il y a un moment de ne pas me représenter.
Pour ce qui est des principes que mon parti a défendus dans la Constitution je vais tout faire pour qu’il y ait une continuité dans le travail de mise en transcription de la Constitution dans la législation et dans les mécanismes démocratiques. Pour moi il n’y a pas de rupture puisque le parti a une vision.
Par ailleurs j’étais plus à l’aise dans le travail de constituant que dans le travail dans ma circonscription. Le travail parlementaire n’était pas évident : la circonscription est très étendue géographiquement et les demandes des Tunisiens dans cette région sont très différentes. J’ai travaillé comme j’ai pu mais il y avait peu de moyens. Or la nouvelle législature va demander encore plus de travail .De ce côté là, ce mandat va être encore plus compliqué à gérer.