À l’intérieur, les pharmacien·nes, équipé·es de gants et masques chirurgicaux, s’affairent derrière le comptoir. Personne ne rentre dans l’officine, dont l’entrée est bloquée par une barrière en métal. Il faut interpeller la pharmacienne cloîtrée à l’intérieur pour passer commande, toujours en respectant la distance de sécurité. Plusieurs client·es réclament des masques mais ils et elles ne sont pas toujours sûr·es d’en trouver.
Une absence d’anticipation
Fournir des masques est l’une des priorités du déconfinement progressif alors que ce n’était pas du tout le cas auparavant. En dotant toute le monde de cette protection, les autorités espèrent éviter les risques d’une seconde vague d’épidémie et un afflux dans les hôpitaux.
Pourtant au début de la crise sanitaire, le gouvernement a longtemps dissuadé la population d’en acheter. “L’usage des masques par des personnes en bonne santé ne sert à rien”, affirmait Chokri Hamouda, alors directeur général de la santé de base au ministère de la Santé le 26 février 2020. Il conseillait aux citoyen·nes de ne pas en acquérir s’ils et elles ne présentaient aucun signe d’état grippal.
Dans la foulée, le 1er mars, Khalil Ammous, PDG de la Pharmacie centrale de Tunis (PCT), a également appelé “à ne pas acquérir des bavettes sans raison valable, pour éviter toute éventuelle perturbation dans l’approvisionnement’’. Le lendemain, la directrice générale de l’Observatoire national des maladies nouvelles et émergentes (ONMNE) Nissaf Ben Alaya a appuyé les propos de Chokri Hamouda en affirmant que les masques “n’étaient efficaces que pour les malades”.
“À l’époque, ce discours était normal”, commente Chedly Fendri, président du Conseil national des pharmaciens d’officine de Tunis (CNOPT). Compte-tenu de la contagiosité du virus, “tous les responsables mondiaux ont changé d’avis avec l’évolution de la maladie”, affirme-t-il.
Pourtant, d’autres pays, notamment en Asie du Sud-Est, ont eu une approche différente et ont rapidement préconisé voire imposé l’usage du masque. Hong Kong, qui a suivi cette politique, enregistre seulement quatre décès depuis le début de l’épidémie. Cette règle, couplée à d’autres mesures de distanciation sociale pouvant aller jusqu’à la surveillance active des cas avérés ou suspects, a permis de maîtriser la contagion.
En Tunisie, la stratégie a tout d’abord été de limiter l’arrivée du virus sur le territoire en instaurant entre autres une politique de surveillance des personnes venant de l’étranger, en isolant les cas suspects ainsi qu’en retraçant tous leurs contacts. Quelques semaines plus tard, il a finalement été décidé de confiner toute la population.
Les masques n’étaient pas une priorité et dans les officines, les stocks ont tardé à arriver. Quand les premiers cas de malades du Covid-19 ont été découverts, la demande a augmenté et les prix ont flambé, notamment en raison de la saturation du marché international. “Avant l’épidémie, on ne vendait pas de masques. On avait quelques boîtes en réserve car seuls quelques patients en achetaient pour protéger leurs proches en cas de grippe”, commente Malek Mekni, du syndicat des pharmaciens d’officines de Tunisie (SPOT).
“Tout le monde a été pris de court et nos capacités de production en masques n’était pas adéquate aux besoins actuels”, explique Chedly Fendri du CNOPT.
“En Tunisie, on dispose seulement de quelques unités de fabrication de masques à usage unique. Cela suffit en temps normal à nos besoins habituels qui sont principalement cliniques”.
En prévision d’éventuelles pandémies, plusieurs pays ont décidé de constituer des stocks supplémentaires de protection pour la population. C’est ce qui est normalement planifié dans la stratégie française par exemple, où le gouvernement a été pointé du doigt pour la gestion désastreuse des réserves. En Tunisie, si les quantités de masques sont suffisantes d’habitude, aucun·e représentant·e n’a évoqué l’existence de réserves additionnelles prévues au cas où. Contacté par Inkyfada à ce sujet, la Pharmacie Centrale et l’Observatoire nationale des maladies nouvelles et émergentes (OMNME) n’a pas donné ensuite aux demandes d’entretien.
Plusieurs témoignages de personnel médical ont déploré le manque de masques et autres équipements de protection pendant cette épidémie. Au 11 mai, sur 1032 malades au total, 143 soignant·es étaient contaminé·es. Malgré cela, Malek Mekni affirme qu’il “n’y a pas eu de vraie pénurie de masques au niveau des hôpitaux ou des cliniques. Le personnel de soin a été bien protégé”. D’après lui, “comme les masques sont réquisitionnés pour les soignants, peu de protections restaient pour la population”.
“La pénurie a plutôt touché le grand public”.
Depuis février, les autorités n’ont pas communiqué les stocks de masques existants qu’ils soient chirurgicaux ou de type FFP2*. D’après Chedly Fendri, environ 25 millions de masques chirurgicaux et 1 million de masques FFP2* à destination des soignant·es ont été commandés de Chine et sont arrivés à la Pharmacie centrale courant avril. Contactée par Inkyfada, la Pharmacie centrale de Tunis (PCT) n’a n’a pas fourni plus de précisions et n’a pas donné suite aux demandes d’entretien.
Des soupçons de corruption
Pendant le mois d’avril, les autorités commencent à prendre des mesures dans leur politique et dans la gestion des stocks de masques. Il est annoncé que le port du masque serait obligatoire après le confinement tandis qu’une production de masques en tissu - c’est-à-dire lavables et donc réutilisables - est lancée. L’objectif est de fabriquer 30 millions de masques à destination du grand public au prix fixe de 1,850 dinar l’unité.
Cette décision de produire des masques grand public contraste avec les recommandations initiales des autorités. Sachant que les premières mesures contre l'épidémie ont été prises dès la fin du mois de janvier et que le premier malade officiel a été découvert le 2 mars, il aura fallu attendre plus d’un mois pour qu’une production en masse soit lancée.
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Dans la foulée, une affaire de soupçon de corruption a été utilisée comme justification par les autorités pour expliquer un retard supplémentaire. Rapidement après que le gouvernement a annoncé son souhait d’inciter les entreprises à fabriquer des équipements de protection individuels, l’entreprise Ortho-Group est pressentie pour la fabrication d’un premier lot de deux millions de masques lavables pour un marché de 3,8 millions de dinars. Or, cette entreprise appartient à Jalel Zayati, député d’el-Badil Ettounsi.
En se basant sur l’article 25 du règlement intérieur de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), qui précise qu’il “est [...] interdit à tout membre de l’Assemblée des représentants du peuple de conclure des contrats à caractère commercial avec l’État, les collectivités publiques ou les établissements et les entreprises publics”, l'Instance nationale de lutte contre la corruption (INLUCC) a décidé de porter cette affaire de suspicion de corruption devant la justice.
Cela constitue un conflit d’intérêt également selon la loi portant sur la déclaration des biens et des intérêts, de la lutte contre l’enrichissement illicite et les conflits d’intérêts de 2018. “Et le conflit d’intérêt, c’est une forme de corruption depuis la loi relative aux lanceurs d’alertes”, commente Charfeddine Yakoubi, ancien président de l'Association tunisienne des contrôleurs publics (ATCP).
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“Même si le gouvernement a demandé l’accélération de la distribution des masques en tissu (...), les procédures concernant les marchés publics n’ont pas été respectées ! On a un décret datant de 2014 qui permet d’avoir recours à des mesures d’urgence sans tenir compte des délais habituels mais tout en respectant les règles de transparence et de gouvernance de la Constitution”, continue-t-il.
Salah Ben Youssef, ministre de l’Industrie, a affirmé lors d’une conférence de presse qu’il ne savait pas que l’entreprise sélectionnée était la propriété du député Jalel Zayati. “Peut-être qu’il ne le savait effectivement pas, sachant qu’il a été nommé récemment mais cela ne peut pas l'excuser”, estime Charfeddine Yakoubi. " Il a plein de conseillers, il y a toute une direction au ministère de l'industrie qui est chargée du domaine du textile, on parle de l'un des plus grand producteur de masques en Tunisie”.
Le chef du gouvernement Elyes Fakhfakh a cependant soutenu son ministre, affirmant qu’il “avait fait des efforts et fait ce qu’on lui avait demandé”. Il a justifié ce non-respect des réglementations en raison “du contexte de guerre” nécessitant “des mesures urgentes” pour éviter les “procédures bureaucratiques” et lancer la production.
Compte tenu de la polémique, le marché n’a finalement pas été attribué à l’entreprise de Jalel Zayati et Charfeddine Yakoubi n’est pas certain que les poursuites iront plus loin.
Mais il reste inquiet quant à “d’autres cas similaires posant de vrais problèmes de transparence” et considère que "les questions de conflits d’intérêt doivent être traitées de manière plus approfondie”.
Dans le rapport de l’Instance générale de contrôle des dépenses publiques relatif à cette affaire des masques, il est indiqué que “plusieurs dépassements et manquements ont ponctué l’opération de confection de masques barrières”.
Pour Charfeddine Yakoubi, le cas de Jalel Zayati est loin d’être isolé pendant cette période de crise sanitaire. “Il y a beaucoup d’autres membres du Parlement qui ont des contrats avec l’État. Certains ont des sociétés de fabrication de médicaments, d’autres des contrats avec le ministère de la Santé, ou encore des contrats de consulting…” Selon lui, la seule différence réside dans le fait que que ces dernier·es n’ont pas été épinglé·es par l’INLUCC. Contactée à plusieurs reprises, l’Instance n’a pas donné suite aux demandes d’entretien.
Du côté du ministère de l'Industrie, cette polémique agace. Abdelkarim Hamdaoui, contrôleur principal des services publics auprès de l’instance générale de contrôle des services publics relevant de la Présidence du gouvernement, en détachement auprès du ministère de l’Industrie, est en charge de l'affaire. Ce dernier accuse l'INLUCC de s'être précipitée pour médiatiser une affaire qui n'aurait, selon lui, aucun fondement.
"Cela fait 20 ans que je suis contrôleur public, s'il y avait le moindre soupçon de corruption, je ne serais pas en train de les défendre. [...] Le ministre n'est pas donneur d'ordres pour les dépenses pour que ce marché ait été conclu", s'impatiente le contrôleur public.
Abdelkarim Hamdaoui affirme qu'aucun marché n'a été signé mais qu'il était alors question de contacter plusieurs entreprises capables de produire 2 millions de masques en urgence, en plus des 30 millions prévus dans les prochaines semaines.
"Au lieu de travailler sur les dossiers urgents, dont la production de masques, je me retrouve à préparer un dossier pour la commission parlementaire et à répondre aux questions de l'Instance de contrôle", ajoute le responsable. "Ça nous a fait perdre du temps dans notre travail mais ce n'est pas vrai que ça a retardé la production, puisqu'il n'y avait pas de marché conclu à la base", insiste-t-il.
Il affirme en outre que le ministère n'est pas entré en contact directement avec le député mais avec son entreprise et assure n'avoir su que cette société était liée à l'élu qu'après la médiatisation de l'affaire. De son côté, Jalel Zayati s'est excusé d'avoir contrevenu aux dispositions du Règlement intérieur de l'Assemblée.
Une couturière fabrique des masques de protection. Crédit : Fethi Belaid/AFP
Une production sans cesse retardée
Fin avril, Chiheb Ben Rayana, le directeur du Laboratoire national de contrôle du médicament (LNCM), espérait que 20 à 25% des 30 millions de masques annoncés allait être disponible en pharmacie dès le début du déconfinement. Contactées par Inkyfada, ni la Pharmacie Centrale ni la S.H.O.C. Room du ministère de Santé n’ont donné suite à nos demandes d’entretien concernant les stocks existants.
L’ensemble du territoire compte près de 1200 entreprises textiles, selon les déclarations du responsable la Fédération tunisienne du textile et de l’habillement (FTTH). En théorie, cela devrait permettre de produire rapidement des masques lavables en quantité suffisante pour l’ensemble de la population. Cependant, 82% d’entre elles sont offshores : leurs marchandises sont principalement destinées à l’exportation, même si elles peuvent, avec ce statut, écouler jusqu’à 50% de leur stock localement.
Slim Jamoussi, directeur général du Centre technique du textile en Tunisie (CETTEX), organisme chargé du contrôle des masques, compte sur cette possibilité pour augmenter le nombre de masques réutilisables sur le marché. “Toutes ces entreprises ont bénéficié du programme de mise à niveau, de l’appui de l’État tunisien… C’est le moment de rendre la pareille”.
Pour autant, plusieurs de ces entreprises exportent déjà leur production. “Beaucoup importent des tissus de France ou d’ailleurs et fabriquent déjà des masques pour l’Europe, la France… C’est une relation de sous-traitance”, détaille Chiheb Ben Rayana du Laboratoire national de contrôle du médicament (LNCM).
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Toujours à la fin du mois d'avril, un site internet lancé par le ministère de l'Industrie invite les entreprises fabricantes d'équipements de protection individuelle (EPI) à s'inscrire et vendre leur production. Mais au 12 mai, moins d'une quarantaine d'entreprises s'y sont inscrites, sans que le détail d'une production effective ne soit communiqué. La "boutique en ligne" indique une capacité de production d'environ un million de masques par semaine mais - selon les informations disponibles - aucune "commande" n'a été passée via la plateforme.
Pour Abdelkarim Hamdaoui, contrôleur principal auprès du ministère, cette plateforme ne donne pas d'indication exacte sur le nombre d'entreprises qui produisent actuellement les équipements nécessaires, ni sur les capacités de production du pays. Le contrôleur principal n'a pas non plus donné de chiffre précis, indiquant ne pas connaître lui-même cette capacité de production.
Contactée à de nombreuses reprises, la FTTH n’a pas donné suite aux demandes d’entretiens concernant le nombre d’entreprises résidentes ou non résidentes qui produisent actuellement des masques à destination du marché local.
Une procédure contraignante
En plus de ces difficultés, plusieurs personnes pointent du doigt les longues procédures d’homologation des entreprises, retardant encore plus la production. Ahmed*, qui possède une usine de fabrication de textile a demandé à être homologué par les autorités depuis près de 3 semaines mais son entreprise est toujours dans l’attente d’une validation, “comme beaucoup d’autres”. “Normalement, les tests de lavage et de vérification des masques sont censés prendre cinq jours !”, affirme-t-il.
Le chef d’entreprise est persuadé que les masques qu’il a fabriqué sont conformes, assurant qu'il a suivi toutes les procédures déjà établies à l’international. “Mon importateur de tissu est aux normes et je suis un ancien agent de laboratoire, j’ai déjà mené des tests de vérification”. Pour lui, ces démarches “bureaucratiques” ralentissent la production alors qu’il y a une “très forte demande”.
Avant de distribuer leurs produits, les entreprises doivent d’abord être certifiées par le CETTEX, le centre chargé de contrôler les masques. Elles doivent déposer un dossier et produire un prototype qui sera testé. Une deuxième vérification est effectuée au moment de la livraison de la marchandise.
“Ce sont des produits qui apparaissent pour la première fois et donc il n'y a pas de vraie norme”, explique Chiheb Ben Rayana, du Laboratoire national de contrôle du médicament (LNCM).
En collaboration avec le CETTEX et la PCT, le laboratoire a établi un cahier des charges basé sur les recommandations de l’Association française de normalisation (Afnor). Les recommandations se résument à deux critères essentiels : ne pas gêner la respiration et constituer une vraie barrières aux particules dont le diamètre est inférieur à 3 micromètres (µm).
Ces étapes de vérifications peuvent prendre du temps, malgré le fait que les institutions travaillent en priorité sur les dossiers relatifs à la crise sanitaire. Fin avril, près de 50 dossiers d’homologation étaient encore bloqués au centre de validation. “Mais une fois qu’elles s’y mettent, c’est vite fait”, relativise Slim Jamoussi, directeur général du CETTEX.
Dans une pharmacie du centre-ville de Tunis, les employé·es ont installé des protection en plexiglas pour ne pas être au contact des client·es.
Des stocks insuffisants malgré le déconfinement
Pour le déconfinement ciblé à partir du 4 mai, les masques réutilisables se font rares dans les pharmacies. “Beaucoup d'industriels n'ont pas encore eu leur certification donc il n’y a pas assez de masques réutilisables sur le marché”, explique Malek Makni, du syndicat des pharmaciens d’officine (SPOT).
L’approvisionnement a commencé mais pour l’instant “cela ne suffit pas à couvrir toutes les pharmacies”.
Aya*, pharmacienne dans le Grand Tunis, a tout de même reçu des masques pour le début du déconfinement. Cependant, ce ne sont pas ceux en tissu promis par le gouvernement, mais des masques chirurgicaux, qui devraient être normalement réservés aux soignant·es. Selon les directives des autorités, Aya doit vendre au maximum 5 masques par personne, à 500 millimes l’unité.
“Avec toutes les polémiques autour du marché, les changements de stratégie et le retard dans la production, l’État s’est retrouvé obligé de libérer une partie des stocks de masques à usages unique”, commente Chedly Fendri du CNOPT. “À partir du dimanche 3 mai, 5 millions de masques chirurgicaux ont été débloqués et répartis entre les grossistes en attendant l’arrivée des masques en tissu.” Mais il se veut rassurant, il reste des stocks pour le personnel médical. “C’est une libération provisoire et exceptionnelle”, insiste-t-il.
Cela n’a quand même pas empêché l’apparition de multiples masques en tissu sur le marché ces dernières semaines. “Certaines personnes vendent des masques en prétendant qu'ils sont aux normes. Certains le sont sûrement mais pas la majorité à mon avis. Et comme ils n’étaient pas vraiment disponibles en pharmacie, les gens se sont rabattus sur ce circuit parallèle”, commente Malek Makni.
Dans certaines pharmacies, il est tout de même possible d’obtenir des masques en tissu. Ces derniers ont pu être mis en vente sans être homologués par l’État. Ils sont possiblement aux normes si les industriels ont suivi les recommandations de fabrication internationales, mais souvent, le prix ne correspond pas à celui annoncé par les autorités (1,850 dinar). “Il y a des pharmaciens qui pensent encore que c’est un prix libre ou d’autres qui n’ont pas réussi à acheter en-dessous du prix certifié. Ou bien c'est un pharmacien qui est en train de profiter du système et de vendre plus cher. Il y a de tout”, avance Malek Makni.
C’est le cas de Rihab*, qui travaille dans une parapharmacie à Bizerte. N’arrivant pas à se fournir en équipements médicaux auprès de la Pharmacie centrale “malgré les annonces continues de l’État”, elle s’est tournée vers des industriel·les qui lui ont vendu ces produits à un prix plus élevé. Plusieurs couturières lui ont également proposé leurs services mais elle a refusé, de peur que leurs masques ne soient pas aux normes.
De son côté, Ahmed, le chef d’entreprise, reconnaît qu’il a déjà pris l’initiative de vendre quelques échantillons de ses masques en tissu, tout assurant qu’il a respecté le prix annoncé, même s’il ne dispose pas encore de son homologation.
“Nous avons demandé aux pharmaciens d’attendre que la procédure soit claire mais entretemps, il y a une forte demande”, commente Chedly Fendri du CNOPT.
D’après lui, la procédure “devient plus claire” et commence à s’alléger. “Les certifications internationales vont être reconnues, il va être possible de sous-traiter à des laboratoires approuvés par le CETTEX, etc. On est en train d’assouplir pour les avoir le plus rapidement possible”.
Chedly Fendri tient à rappeler que même si des normes sont en train d’être établies, les masques lavables ne sont pas destinés à un usage médical. “Contrairement au masque FFP2 et dans une certaine mesure au masque chirurgical, le masque en tissu protège surtout les autres.” Il peut tout de même avoir un effet légèrement protecteur pour les personnes saines mais ce sont surtout les individu·es contaminées qui réduisent leur capacité de contagion en s’équipant ainsi. “C’est la synergie du port mutuel du masque”, conclut-il.
Tous·tes s’accordent sur un point, porter un masque et “même un bout de tissu”, quel qu’il soit, protège toujours plus que de ne pas en porter du tout... un discours diamétralement opposé à celui qui était porté au début de l’épidémie, en l’absence d’une vraie stratégie d’anticipation.