L’IVD : Une instance face aux défis de la justice transitionnelle

L’Instance Vérité et Dignité a pris ses fonctions depuis presque un an. Entre les dossiers de plaintes qui s’empilent et le contexte politique différent, l’instance arrivera-t-elle à mener à bien sa tâche?
Par | 22 Juillet 2015 | reading-duration 25 minutes

Critiquée dès ses débuts et peu soutenue officiellement, l’Instance Vérité et Dignité a jusqu’à décembre 2015 pour recevoir les plaintes des victimes du régime de Ben Ali mais aussi de Bourguiba et de la période juste avant l’indépendance (1955). Le contexte post-révolutionnaire est aussi concerné puisque la délimitation s’arrête en 2013, la date à laquelle la loi a été votée.

Aujourd’hui, l’Instance travaille sur le tri des milliers de dossiers reçus et les premières auditions de victimes. Mais sur le long terme, son travail aura-t-il un impact? Les pressions politiques et le contexte sécuritaire menacent-ils le fonctionnement de cette instance?

"Vous avez vu la porte? Je suis très fière de notre porte, nous l’avons faite après la construction du bâtiment. L’idée c’est que les gens doivent garder une image de la justice transitionnelle tunisienne et bien spécifique à notre pays", commente Sihem Ben Sedrine, présidente de l’Instance Vérité et Dignité.

L’embrasure de la porte d’accueil est en effet arrondie et ornée d’incrustations dans la pierre et de symboles rappelant la période antique. C’est la seule touche tunisienne dans cet immeuble imposant et très sécurisé. On aperçoit dès l’avenue Mohamed V les lettres en arabe et en français du bâtiment situé dans le quartier de Montplaisir à Tunis. Un lieu central et aisément reconnaissable pour les victimes d’exactions qui ont fait parfois le chemin jusqu’à la capitale. Une entrée leur est réservée.

L’Instance a pour mission d’enregistrer leurs plaintes, de prendre ensuite leurs témoignages, d’enquêter et de tenir des auditions en vue d’assurer le processus de réparation et de réconciliation que sous-entend la notion de “justice transitionnelle”.

La présidente Sihem Bensedrine reçoit dans un large bureau. Il y a moins d’un an, l’instance n’avait pas de locaux et nous l’avions rencontrée au Ministère des droits de l’homme dans une salle vide. Les meubles ne sont pas les seuls à avoir changé, l’IVD est désormais une machine bien huilée d’une centaine d’employés et près de 15000 dossiers de plaintes déposés.

Une instance au milieu de la polémique autour de la justice transitionnelle

Le drapeau tunisien flotte à la porte de l’IVD. Crédit image : Thierry Brésillon

Les débuts ont pourtant été difficiles. Sous le gouvernement du parti islamiste Ennahdha, le processus de justice transitionnelle avait encore des difficultés à se mettre en place. Manque de volonté politique ou problème de priorités, la question avait fait polémique au sein du parti surtout pour certains militants directement concernés par la torture, l’emprisonnement ou l’exclusion.

Trouver le juste milieu entre la vengeance et le déni, le règlement de comptes et l’oubli opportun du passé reste un enjeu post-révolution que les différents gouvernements ont du mal à gérer. L’exclusion de membres du parti du RCD lors des premières élections et le gel des biens de plus de 400 hommes d’affaires avaient été les réactions immédiates après la révolution. L’emprisonnement de certains cadres sécuritaires et de membres de la famille du clan des Trabelsi avaient également apaisé pendant un moment. Différentes amnisties à l’égard de prisonniers politiques et la récupération de certains biens avait suivi.

Depuis, la justice a libéré plusieurs anciens représentants du régime de Ben Ali et le nouveau président de la république Béji Caid Essebssi a appelé dans plusieurs de ses intervention à une “réconciliation nationale” sans vraiment préciser ses intentions: une amnistie générale? une réconciliation rapide pour permettre aux hommes d’affaires corrompus de revenir?

“Oui, il faut une réconciliation nationale. La justice transitionnelle ne peut pas condamner tout le monde, mais elle a servi à donner du baume au cœur aux victimes de l’ancien régime. Nous devons cesser de régler nos comptes avec le passé. Il faut tourner la page des poursuites et faire en sorte que les Tunisiens qui ont de l’argent [les benalistes] se remettent à investir en ­Tunisie et soient utiles à leur pays. Il faut qu’il y ait une transaction entre l’Etat et eux et qu’ils rapatrient leurs biens pour ­investir chez nous”, déclarait-il lors d’une interview à l’hebdomadaire Paris Match en mars 2015.

Ce discours ambigu s’ajoute à un passé directement lié à la justice transitionnelle puisque le président de la république a été directeur de la sûreté nationale sous Bourguiba et Ministre de l’Intérieur. Difficile de savoir si parmi les milliers de plaintes déposées, certaines concernent cette période mais le président appartient en tant que témoin ou acteur à cette période de la justice transitionnelle.

Autre bémol, son parti Nida Tounes, gagnant des élections législatives est connu pour ses liens avec certains membres de l’ancien régime.

Chacun se tient à distance du processus de justice transitionnelle, en particulier la sphère politique. Or, comme le constate l’experte Kora Andrieu qui a supervisé le processus de justice transitionnelle en Tunisie pendant trois ans pour le Haut commissariat aux droits de l’homme, la question de la justice transitionnelle a été proposée par Ben Ali dès son dernier discours du 13 janvier.

“C’est lors de son dernier discours télévisé que Ben Ali ouvre, sans doute sans le savoir, le débat sur la justice transitionnelle en Tunisie. S’efforçant en vain d’apaiser les tensions, il promet, le 13 janvier, de rendre des comptes sur les crimes commis par les forces de l’ordre contre les manifestants et de créer trois commissions : une commission d’enquête sur les violations des droits de l’homme commises pendant les manifestations, une commission d’investigation sur la corruption, et une commission pour la réforme politique. Ces trois commissions seront créées après la révolution, par le premier gouvernement de Mohamed Ghannouchi et sous la présidence de Fouad Mebazaa.

En dépit de multiples tentatives de décrédibilisation ‐ certains critiques affirmant qu’il s’agissait des "commissions de Ben Ali" ‐, toutes trois sont parvenues à des résultats significatifs et qu’il importera de savoir intégrer au processus de justice transitionnelle dans son ensemble, afin de lui apporter toute sa cohérence.”

Aujourd’hui la justice transitionnelle est encore perçue comme un processus à double tranchant selon Kora Andrieu dans la mesure où elle reste instrumentalisée politiquement:

“En Tunisie, la logique révolutionnaire, qui veut d’abord faire table rase du passé en écartant les forces "contre‐révolutionnaires" de l’ancien régime, est vite venue concurrencer la dynamique transitionnelle, perçue, elle, comme trop conciliante avec ces dernières, puisqu’elle prévoit notamment la clémence à leur égard, voire la réconciliation.” écrit-elle.

Après la commission d’enquête sur les blessés de la révolution de Taoufik Bouderballa et la commission d’enquête sur la corruption d’Abdelfattah Amor qui ont balisé une partie du terrain, L’IVD est le réceptacle supposé ouvrir la voie vers un début de justice et de vérité.

Elle est supposée servir de garant quelque soit le climat politique ou les forces en présence mais l’actualité ne joue pas en sa faveur. Défaillance judiciaire et manque de réel processus de vérité, quatre ans après la révolution et malgré ces enquêtes, la frustration reste encore présente. Personne n’a été condamné directement pour torture par exemple en Tunisie malgré de nombreux cas avérés.

Même si le président Ben Ali a cumulé les condamnations par contumace, la plupart des membres de son gouvernement ont été libérés faute de preuves suffisantes pour les inculper.

Pour d’autres, le sentiment de nostalgie voire de regret du passé refait surface en période d’instabilité politique et sécuritaire surtout après les deux attentats du Bardo et de Sousse.

Difficile donc de savoir si la société tunisienne est attachée au processus de justice transitionnelle et si le travail de l’IVD sera reconnu. L’instance, elle, se doit avant tout de faire la lumière sur les exactions.

Une instance qui avance lentement mais sûrement

Sihem Ben Seddrine est la Présidente de l’IVD. Crédit image : Thierry Brésillon.

Le travail ne fait que commencer. Une fois la loi votée sur la justice transitionnelle en décembre 2013, les polémiques ont éclaté autour de la Présidente de l’instance, puis il y a eu les difficultés administratives à trouver le personnel qualifié et à débloquer le budget (30 millions de dinars ont été prévus pour l’IVD, pour le moment, l’instance a reçu 10 millions). Bien que soutenue par une partie de la société civile, une autre part de militants est restée méfiante.

"La loi est longtemps restée dans les tiroirs de l’assemblée avant d’être votée et aujourd’hui les procédures prennent beaucoup de temps. Et parfois, il faut des prises en charge immédiates et non pas attendre que le dossier soit traité ou que l’audition commence ce qui prend entre 3 et 6 mois” commente Salah Hachem ancien membre de la Ligue des droits de l’homme tunisienne."

En plus de l’accompagnement des victimes à l’IVD, il effectue avec d’autres de ses collègues un travail régulier de sensibilisation pour amener les gens à s’intéresser au processus de justice transitionnelle. Un travail complémentaire de celui de l’instance qui doit amener les victimes vers la justice.

Aujourd’hui, l’instance n’est pas toujours regardée d’un bon oeil par les politiques mais elle travaille, lentement, selon les militants de la société civile mais sûrement assure l’instance.

“Actuellement nous avons commencé par accepter les dossiers des victimes aux bureaux d’ordre. Ensuite nous trions les dossiers car certains ne concernent pas toujours l’IVD. La prochaine étape dans l’immédiat, c’est l’écoute de la victime avec le psychologue et le sociologue, il faut que la victime soit encadrée pour éviter les réactions extrêmes comme les suicides qu’il y a eu dans d’autres pays qui ont fait le processus”, explique Oula Ben Nejma qui s’occupe de la commission d’enquête.

Les “dossiers” sont surtout des données enregistrées avec carte d’identité et documents à l’appui qui permettent aussi de faire le tri pour voir si certains litiges ne concernent pas l’IVD. Pour l’instant 4% des plaintes reçues ne sont pas du ressort de l’IVD. Puis viendra ensuite le “statement taking” à savoir, la récupération du témoignage.

Répartition des plaintes par régions et par sexe
Cliquez sur la région pour visualiser les données
Tunisie
11,652
1,626

L’audition des victimes

Autre étape très attendue après l’été, celle de l’audition des victimes :

“Si la victime a un exemple de comment fonctionnait la machine dictatoriale, c’est un cas spécial, il peut y avoir une audition publique à sa demande. Ces auditions se feront en parallèle. Des auditions d’individus qui vont raconter un récit de violation, soit une confrontation avec le bourreau soit une audition thématique par exemple sur un médecin tortionnaire” explique Sihem Ben Sederine.

Pour l’instant, des auditions pilotes ont été menées en mai dernier. “Les séances d’audition privées durent d’une à deux heures en moyenne. Elles sont régulièrement chargées en émotion et les écoutants doivent faire preuve d’empathie dans cet exercice souvent difficile. La principale difficulté réside dans les effectifs qui restent limités à l’heure actuelle”, témoigne Seif Soudani chargé des relations publiques à l’IVD.

Zouheir Makhlouf, un des commissaires, reçoit des citoyens qui veulent déposer leur dossier. Crédit image : Thierry Bressillon.

Ces auditions qui commenceront à la fin de l’été, en marge de celles tenues à huit clos, vont être cruciales pour le processus de réconciliation. Les victimes sont de tout type et la période couverte par l’Instance de 1955 à l’après révolution permet à différentes générations de porter plainte mais rend la tache difficile pour les enquêteurs.

“Nous avons tout le spectre de familles politiques qui sont venues déposer des plaintes, les blessés et les parents de martyrs de la révolution représentent un des plus gros contingent mais ils demandent plus la vérité et une reconnaissance de l’état que des réparations financières. Nous avons aussi le cas de figure de membres de l’ancien régime qui viennent demander à passer par la commission d’arbitrage financier par exemple, pour reprendre leurs affaires”, affirme Sihem Ben Sedrine.

Les révoltes du pain en 1984, la persécution de la gauche et des yousséfistes dans les années 60-70 mais aussi le soulèvement du bassin minier en 2008 et la révolution, le personnel de l’IVD dit avoir reçu des plaintes pour chacun de ces événements historiques.

Des difficultés juridiques et logistiques

D’autres restent encore sceptiques sur certains aspects de la loi et du fonctionnement de l’instance comme la juriste Héla Boujneh. Elle est également coordinatrice de l’association de défense des droits de l’homme. La jeune femme critique le manque de réforme dans le système judiciaire qui risque d’impacter l’Instance. Selon l’article 7 de la loi, l’IVD coopère avec la justice dans le cas de violations contre les droits de l’homme.

“La redevabilité et la reddition de comptes relèvent de la compétence des instances et pouvoirs judiciaires et administratifs, conformément à la législation en vigueur.“

Pour ces procès, des chambres spécialisées sont prévues avec des magistrats “indépendants” c’est-à-dire qui n’ont pas participé à des procès politiques sous l’ancien régime. “La loi est floue là-dessus sachant que la plupart des procès étaient politiques. Le problème c’est que l’instance n’est pas mandatée pour suivre le travail de la justice donc si certains procès avortent à cause du manque d’indépendance d’un magistrat que fait-on?”, commente Héla Boujneh.

Pour Sihem Ben Sedrine, la réputation des magistrats et leur passé devrait suffire à faire le tri: “Nous savons tous plus ou moins quels sont les juges qui ont été compromis. Et nous travaillons activement avec l’Instance pour l’indépendance de la magistrature sur la question.” Mais cette ligne fragile reste l’un des enjeux des procès et des débats futurs surtout lorsque les auditions publiques commenceront.

Pour Héla Boujneh, la loi de la justice transitionnelle et qui a donné naissance à l’Instance reste trop complaisante avec les criminels: “On parle beaucoup des victimes ce qui est très bien mais peu des auteurs de ces crimes. Il ne faut pas oublier que certes, certains cas doivent amener vers la réconciliation et la réparation mais que la justice doit aussi être présente.”

Pour Kora Andrieu, le risque est que l’IVD devienne une sorte de décorum. “Un peu comme l’exemple marocain où l’instance équité et réconciliation n’avait servi finalement que de carthasis pour certains sans répercussions judiciaires.”

L’autre difficulté de l’instance est aussi lié à une surcharge de ses missions dans un mandat très limité (quatre ans). Dans les deux interviews que nous avaient accordées Sihem Ben Sedrine en juillet 2014 et en mai 2015, elle faisait part de l’ampleur du travail :

"Notre mandat ne comprend pas juste la prise en charge des victimes. Il y a aussi l’arbitrage sur les délits financiers, les études pour des réformes institutionnelles, la question du travail sur la mémoire qui va être un chantier énorme. Et il faut des bras pour arriver à faire tout cela."

Bureau du dépôt des dossiers. Crédit image : Thierry Brésillon

Sans compter le travail que nécessite chaque dossier: “La région de Kasserine par exemple après Tunis est celle qui compte le plus de plaintes. Et je sais que cela va continuer, nous allons au moins avoir le triple d’ici la fin du délai de dépôt. Après ce n’est pas tant le nombre de plaintes qui pose problème mais plus la qualification de celles-ci, il faut une prise en charge psychologique et un suivi pour chaque plainte et arriver à définir aussi les plaintes, s’agit-il de maltraitance de torture? Trouver dans les archives des procès, les cas qui remontent aux périodes les plus anciennes. D’autres cas sont très lourds et demandent une logistique importante: les traumatismes d’enfants, les viols de femmes.” ajoute-t-elle.

Malgré ses difficultés, l’Instance continue ses appels à candidature pour des sociologues et des psychologues. Sans compter les bureaux régionaux qui doivent ouvrir dans les prochains mois. Cette persévérance témoigne aussi d’une volonté d’aller de l’avant malgré un contexte politique qui influe directement sur son travail.

Une instance tributaire du contexte politique et sécuritaire

"Ce n’est pas facile car nous travaillons dans un contexte assez hostile”, déclarait Sihem Bensedrine en mai dernier. Depuis, le climat s’est apaisé notamment avec la signature d’un décret rendant accessible les archives de la présidence pour l’IVD.

Cet enjeu avait créé un scandale en décembre 2014 lorsque la présidente et ses équipes avaient tenté de prendre directement les archives au palais juste après l’élection du nouveau président de la république tunisienne.

"Mais il y a encore des pertes de temps et d’énergie à cause de résistances de l’administration à s’impliquer avec nous. Le gouvernement de Mehdi Ben Jomaa nous a mis beaucoup de bâtons dans les roues."

Aujourd’hui, Sihem ben Sedrine qualifie sa relation de “correcte” avec le nouveau gouvernement même si elle refuse de parler de soutien.

“Nous n’avons pas eu de soutien mais nous n’avons pas eu non plus d’obstruction, nous avons des relations de travail avec le cabinet du Président. Par contre, du coté du ministère de la Justice, il y a une bienveillance, mais ce n’est pas commun à tous les ministères.”

“Avec le nouveau ministre de l’Intérieur, la porte est complètement fermée. L’argument de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme est le prétexte pour fermer l’accès à tout. Pour moi le travail de l’IVD est au coeur de la lutte contre le terrorisme car le terrorisme vient aussi d’une haine de l’état, de la répression policière. Nous faisons du déminage pour les générations futures et c’est primordial dans la lutte contre le terrorisme”, ajoute-t-elle.

Des tâches multiples, un processus lent et compliqué, et une dépendance involontaire à l’actualité sécuritaire, l’IVD pourrait être menacée par son statut d’“hyper-institution” comme l’avait qualifiée la chercheuse et juriste Ghofrane Ounissi dans un article pour le think tank Jasmine Foundation publié en janvier 2015.

Des politiques favorables à un processus parallèle

L’équipe des écoutants (sociologues et psychologues) étudie les dossiers pour la préparation des auditions. Crédit image : Thierry Brésillon

L’ampleur des missions mais aussi la diversité de celles-ci peuvent la soumettre à des pressions politiques très fortes. A l’assemblée, la commission en charge de la justice transitionnelle vient à peine de commencer à plancher. Elle est dirigée par un ancien condamné et exilé, Walid Banneni membre du parti Ennahdha, mais elle compte aussi une figure du syndicalisme et du mouvement du bassin minier, Adnane Haji. Le vice-président de l’Assemblée, Ali Ben Salem, est autre figure de la défense des droits de l’homme ou encore Bochra bel Haj Hmida, militante. 8 députés de Nida Tounes, 7 d’Ennahdha et 7 de différents partis sont présents dans cette commission.

Le chiffre semble équilibré pour cette commission même si certains députés ne cachent pas leur volonté de faire un processus parallèle à celui de l’instance comme en témoigne cet article publié par l’hedomadaire Jeune Afrique en mai 2015 qui avance que près de 155 députés sur 217 seraient en faveur de cette “réconciliation nationale” parallèle pour pallier les problèmes juridiques de l’Instance et permettre à certains cas comme des ex-ministre ou les entrepreneurs de profiter d’un régime différent que celui du clan Ben Ali ou des tortionnaires. Une initiative qui rejoint celle des discours de Beji Caïd Essebssi.

Pas d’accord ni de loi pour l’instant sur cette éventuelle amnistie générale mais la frontière entre l’oubli et le rétablissement de la vérité reste encore très fragile en Tunisie. Certains avancent le pragmatisme politique pour justifier le retour des technocrates corrompus car “ils ont les compétences” .

D’autres ne veulent plus entendre parler de torture ou d’exactions ni même de droits de l’homme quand l’actualité montre des terroristes qui ont envahi le quotidien. Face à ces arguments, l’Instance risque de devenir un colosse aux pieds d’argile.