La décision de ce 30 juin intervient après une série d'ajournements pour cette affaire spécifique. Prévue initialement le 9 juin, la session avait été reportée une première fois au 16, puis au 30 juin. Ce dernier ajournement a été qualifié de “définitif” par le tribunal, malgré les requêtes de la défense qui dénonçait des délais contraints et une entrave au droit à un procès équitable.
Une traque judiciaire
Ce jugement s’inscrit dans une série de poursuites judiciaires visant Sonia Dahmani sur la base du décret 54.
Chronologie de l’affaire :
- 11 mai 2024 : arrestation de Sonia Dahmani.
- 6 juillet 2024 : condamnée à un an de prison, réduit à huit mois en appel.
- 20 août 2024 : placement en détention.
- 24 octobre 2024 : condamnée à deux ans de prison pour des propos sur le racisme. Cette peine ramenée à un an et demi en appel le 24 janvier 2025.
- 9 juin 2025 : première date d’audience dans la nouvelle affaire, reportée.
- 16 juin 2025 : second report.
- 30 juin 2025 : condamnation à deux ans ferme.
À ce jour, l’avocate fait face à cinq affaires distinctes. Parmi ces affaires, quatre ont été requalifiées en délits. La cinquième, connue sous le nom de ” dossier des prisons”, porte sur des déclarations médiatiques concernant les conditions de détention en Tunisie. Contrairement aux autres, cette affaire a été classée comme crime par la chambre d’accusation, une décision maintenue malgré un arrêt de la Cour de cassation annulant cette requalification.
La Cour de cassation a ainsi rappelé que l’article 24 du décret 54 s’applique uniquement aux infractions commises via les systèmes d’information électroniques et ne peut pas viser les opinions professionnelles émises dans les médias traditionnels.
Ainsi, la chambre d’accusation, en persistant dans sa qualification de certaines affaires, dont le dossier des prisons, de crimes, contredit la jurisprudence supérieure. Les avocat·es de Sonia Dahmani jugent que cette escalade judiciaire est symptomatique d’une volonté politique de poursuivre "coûte que coûte".
Cette nouvelle condamnation renforce encore plus les inquiétudes quant à l’usage extensif du décret 54 pour réprimer les voix dissidentes. De nombreuses organisations dénoncent une instrumentalisation de ce texte pour restreindre l’espace des libertés en Tunisie.