Après le 7 octobre, les Tunisien·nes sont descendu·es en force dans les rues pour affirmer leur soutien aux Palestinien·nes après la riposte violente de l’armée israélienne sur le territoire de Gaza. Érigés en réponse à l’attaque du Hamas contre des Israélien·nes dans le Kibboutz de Ksar Aza, les bombardements de l’armée israélienne ont déjà fait plus de 11.000 victimes en à peine un mois. Malgré les appels au cessez-le-feu et des centaines de milliers de manifestant·es à travers le monde, l’attaque perdure et les mort·es se multiplient.
Depuis le premier jour, Hamouda a commencé à documenter ces mobilisations spontanées et les actions de soutien de la société civile à Tunis. “La cause palestinienne englobe notre douleur, notre chagrin, notre lutte et notre colère, poussant les individus, moi compris, à ressentir une sensation d'attaque, de préoccupation et d'obligation d'agir”, explique le photographe.
Dans l’incapacité de couvrir ce qui se passe sur le terrain, à plus de 2000 kilomètres, Hamouda a décidé de témoigner de ce qui se joue dans son pays : protestations, collectes de soutien, événements cinématographiques... La mobilisation pour Gaza prend de nombreuses formes en Tunisie, où le soutien inconditionnel à la cause palestinienne fait consensus, tant sur le plan politique et institutionnel que du côté de la société civile et des citoyen·nes.
Devant le théâtre municipal, première marche de solidarité organisée en soutien au peuple de Gaza après la riposte de l’armée israélienne.
Tunis, le 12 octobre 2023.
Du côté du pouvoir, un projet de loi contre la normalisation avec Israël a été longuement débattu à l’Assemblée, avant d’être finalement suspendu par la Présidence. Dans la rue, les mots “résistance”, “colonisation”, “vengeance”, “génocide”s’étalent en lettres grasses sur les pancartes, les murs et les visages. Pour les protestataires, la position politique est claire : le rejet total des gouvernements jugés favorables au pouvoir israélien.
Hamouda rappelle que cette résistance prend diverses formes, y compris des actions pacifiques telles que le boycott de produits et la remise en question de la domination du marché occidental. Plus largement, “cette cause a brisé l'illusion de la décolonisation”, estime-t-il, “révélant la nature hypocrite des puissances occidentales qui défendent sélectivement les droits de l'homme en fonction de leurs intérêts”.
Pour Hamouda, la cause palestinienne est une histoire vive de “la lutte des peuples opprimés à travers le monde et tout au long de l'histoire, servant de rappel saisissant de l'histoire continue de l'oppression”.
“ Chaque photographie devient un cri fort ou silencieux, transmettant la douleur, l'espoir, la colère et le sentiment collectif ressenti pour le peuple de Gaza au spectateur ”
Sur la photo, la tête de la jeune fille en foulard forme la dernière lettre du mot “جريـمــة ” (littéralement “Crime“)
Sur l'avenue Habib Bourguiba à Tunis une jeune femme portant le drapeau palestinien passe devant une inscription sur le mur d’une banque le jour de « la Marche de la colère ».
L’inscription en arabe التطبيع جريـمــة se traduit : « La normalisation est un crime ». Un projet de loi visant à criminaliser la normalisation avec Israël était débattu depuis plusieurs mois au Parlement, jusqu’à ce que le vote du projet soit suspendu, en accord avec Kaïs Saïed.
Tunis, le 18 octobre 2023.
Haut - Deuxième sit-in devant l'ambassade américaine pour protester contre la position des États-Unis soutenant Israël dans sa riposte armée dans la bande de Gaza. La veille, Joe Biden avait prononcé undiscours liant l’invasion de l’Ukraine par la Russie et la crise actuelle en Palestine. Dans le même temps, un hôpital de Gaza a été la cible de frappes aériennes israéliennes.
Tunis, le 20 octobre 2020
Bas - Une affiche du drapeau israélien brûle sur le bitume, lors de la première marche organisée à Tunis en solidarité avec Gaza. Selon l’ONU, à cette date, plus de 260.000 Palestinien·nes ont déjà été déplacé·es.
Tunis, le 12 octobre 2023
“Nous ne pleurerons pas, nous prendrons notre revanche” est inscrit en arabe sur une pancarte en arabe, pendant le second sit-in organisé devant l'ambassade américaine.
Tunis, le 20 octobre 2023.
Des jeunes bénévoles du Croissant Rouge Tunisien organisent la collecte d’aide de produits de première nécessité au profit de la population de la bande de Gaza. Des ONGs ont dénoncé le blocage par Israël de l’aide humanitaire vers Gaza, notamment à la frontière égyptienne.
Mégrine, le 28 octobre 2023.
Devant le théâtre municipal, pendant la première marche de la solidarité avec Gaza, dans le centre ville de Tunis. Le keffieh, véritable symbole de la cause palestinienne, est régulièrement brandi dans les manifestations.
Tunis, le 12 octobre 2023.
Des manifestant·es brûlent un drapeau américain pendant un sit-in organisé devant l'ambassade des États-Unis. La veille, l’hôpital Al-Ahli Arabi a été bombardé, occasionnant la mort de plusieurs centaines de personnes.
Tunis, le 18 octobre 2023.
Deuxième sit-in organisé devant l’ambassade des États-Unis à Tunis.
Tunis, le 18 octobre 2023.
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Des bougies sont allumées sur l’avenue principale de Tunis en soutien aux femmes et enfants victimes des bombardements dans la bande de Gaza, pendant un sit-in organisé par l’Association Tunisienne des Femmes Démocrates (ATFD).
Tunis, le 27 octobre 2023.
Des montages d’Emmanuel Macron sont projetés lors d’une projection de films dans l’espace public, organisée par des jeunes du mouvement « Cinéma de la Résistance », en guise de protestation contre la position française de soutien à Israël.
Tunis, le 24 octobre 2023
À l’occasion du sommet conjoint arabo-islamique à Riyad, en Arabie saoudite, une marche est organisée par la société civile et des partis politiques.
Ce sommet exceptionnel a réuni des dirigeants et des représentants de la Ligue arabe et de l'Organisation de la coopération islamique, et a condamné unanimement la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza, mais sans qu’aucune sanction concrète contre Israël n’ait été prise.
Le président tunisien Kaïs Saïed s’est abstenu de se rendre à ce sommet, malgré la présence d’une délégation tunisienne.
Tunis, le 11 novembre 2023.
Des jeunes regardent des films sur la Palestine pendant la deuxième projection de l'événement « Cinéma de la Résistance » sur la place Mohamed Brahmi. L’événement a été organisé devant le Goethe Institute, un établissement culturel allemand. La position de l’Allemagne, favorable à Israël, a été régulièrement dénoncée. Centre-ville de Tunis.
Tunis, le 26 octobre 2023
Une bénévole du Croissant Rouge Tunisien devant un dessin représentant la mosquée Al Aqsa à Jérusalem sur le mur du centre de l'organisation humanitaire.
Mégrine, le 28 octobre 2023.
Une militante évoque le fait que bien que” la Tunisie soit un ancien pays colonisé désormais indépendant, le mouvement de décolonisation restera inachevé tant que la Palestine ne sera pas libérée”
Sit-in devant l’ambassade des États-Unis contre le soutien américain à Israël. .
Tunis, le 20 octobre 2023.
Un manifestant brandit une pancarte devant l'ambassade des États-Unis pour protester contre le soutien américain à Israël.
Tunis, le 18 octobre 2023.
Le 16 octobre 2023, trois jeunes Tunisiens ont été arrêtés après avoir recouvert de messages et de tags pro-palestiniens la façade extérieure de l’Institut Français de Tunisie (IFT). L’effacement de slogans et drapeaux palestiniens protestant contre le soutien du gouvernement français à Israël ont été effacés sur le mur du bâtiment, situé en plein centre-ville de Tunis, suscitant la polémique.
Tunis le 10 Novembre 2023.
Partie de la fresque de la paix pour la Palestine, rue de la Palestine à Djerba, réalisée à l’occasion de Djerbahood en 2014 dans un quartier de Houmt Souk. Djerba est connu pour abriter la plus ancienne communauté juive de Tunisie.
Djerba, le 2 novembre 2023.
Pour le photographe Hamouda Bouabane, cette dernière photographie, hors de de l’actualité brûlante et loin de la capitale, a une portée symbolique et montre la place importante de la Palestine en Tunisie.