Aziz, médecin résident en huitième année, a grandi à Médenine, où il a obtenu son baccalauréat. Il déménage ensuite à Tunis pour poursuivre des études en médecine sans aucune connaissance préalable du système éducatif, ni du nombre d'années nécessaires pour décrocher un diplôme. Son seul lien avec le domaine était que son oncle était médecin.
Aziz a grandi dans une famille plutôt aisée. Il ne s'est "jamais senti pauvre ou dans le besoin". Sa famille continue de le soutenir aujourd'hui en payant son loyer et en lui versant de l'argent qu'il a épargné pour acquérir une voiture. Pour lui, le soutien de sa famille est vital, sans quoi sa situation financière aurait été plus difficile, ne lui assurant que le strict minimum.
Au lycée, Aziz n’était pas un très bon élève. Contrairement à ses attentes, il obtient une moyenne élevée au baccalauréat, ce qui lui ouvre les portes de la faculté de médecine, un choix de carrière qu’il ne s’imaginait pas faire. "Une décision irréversible si l'on passe en deuxième année." , estime-t-il.
Déterminé à réussir, Aziz comprend, non sans peine, que pour atteindre son objectif, il doit surmonter les difficultés du long parcours qui l'attend, à savoir l'énorme quantité de cours, les heures de travail interminables et le manque de sommeil.
Aujourd'hui, Aziz s'estime chanceux. Après plusieurs années de travail acharné, il a réussi à terminer ses cinq premières années d'études et à obtenir la spécialité qu'il souhaitait. Néanmoins, le jeune homme n'est pas satisfait de sa situation financière et estime que le salaire d'un médecin résident est trop faible, surtout par rapport aux difficultés qu'exige la profession et à la situation économique du pays.
Voici un aperçu de ses sorties et entrées d’argent mensuelles
Aziz a fait l’acquisition d’une voiture pour éviter les transports en commun et la fatigue qui en découle. Mais avec l’augmentation du prix du carburant, Aziz se déplace encore beaucoup à pied pour limiter ses dépenses. Il essaie également, dans la mesure du possible, de réduire ses dépenses en produits alimentaires et de ne pas gaspiller son argent dans les restaurants, dont les prix ont explosé ces deux dernières années, mais il ne se prive pas pour autant de ses loisirs. Il se rend, par exemple, une fois par mois dans une maison d'hôtes avec ses amis. Cette sortie, bien que coûteuse, lui permet de se détendre et d’échapper au stress de l’hôpital.
Sans le soutien de sa famille qui couvre le loyer, Aziz n'aurait pas les moyens de se divertir avec son salaire de médecin résident. Il mènerait alors une “vie monotone et routinière”, ce qu’il refuse catégoriquement.
Aziz trouve injuste que la fonction publique ne tienne pas compte de l’inflation, contrairement aux professions libérales qui n’exigent pas autant d’années d’études que la médecine et où les salaires sont plus élevés. "Je trouve insensé que l'État n'offre pas un meilleur salaire aux médecins”, proteste Aziz.
“Avec le manque d'équipement et la pénurie de médicaments, nous nous retrouvons démunis face aux maladies et aux virus qui envahissent nos hôpitaux. Ces facteurs encouragent la migration et expliquent le manque de personnel médical et la détérioration de la santé publique en Tunisie", déclare le jeune médecin.
Voici le détail de ses dépenses et revenus mensuels
Zone grise
Aziz obtiendra son diplôme dans quelques années. Entre-temps, il craint que les prix n'augmentent à nouveau, alors que les salaires du personnel de la santé publique restent inchangés.
Aziz devra passer un examen final pour terminer son cursus universitaire, avant d'être transféré à Jendouba pour commencer à travailler. Il ne recevra donc pas de salaire pendant huit mois. Le jeune homme avait l'intention d'économiser une somme qui lui permettrait de subvenir à ses besoins pendant cette période, puisqu'il recevra une augmentation de salaire l'année prochaine. Mais aujourd'hui, il craint que cette hausse de salaire ne serve qu'à atténuer les dégâts causés par l'inflation.
Futur
Aziz n'a pas l'intention de partir à l'étranger. Malgré la difficulté de sa condition, et les répercussions sur sa santé mentale et sa stabilité, il ne s'agit pour lui que d'une situation temporaire. En effet, Aziz imagine un avenir plein d'opportunités professionnelles assurées. Ses années de persévérance sont ainsi un investissement qui lui garantira, dans le futur, un poste stable qui ne souffrira pas du chômage ou de la dureté du marché du travail.