Il y a le son hypnotisant des zokra tunisiennes, de petites flûtes à l’embout évasé et à la voix criarde, qui draine le visiteur vers le cercle humain déjà formé dans le village. Il y a les chevaux, affublés de costumes colorés, qui tournent et dansent dans une chorégraphie travaillée avec leurs cavaliers.
Le spectacle traditionnel est immuable. La zarda, qui peut signifier un festin, de la nourriture à volonté, est un rituel créé avant l’arrivée de l’Islam pour fêter le printemps chez les Amazigh.
Plus d’un millénaire plus tard, c’est comme si rien n’avait bougé, sauf la date. En apparence. Après l’arrivée de l’Islam, les Soufis ont peu à peu repris ces fêtes populaires à leur compte. Ce courant religieux tourné vers un Islam contemplatif et méditatif est une forme non orthodoxe de l’Islam. L’aspect mystique de sa pratique a aujourd’hui imprégné les Zardas.
Entre les sacrifices de vaches ou moutons, le spectacle de chevaux, le couscous, le marché, et le Dhikr (l’invocation de Dieu), les Zardas contemporaines ont pour objectif de créer une dynamique économique et un esprit de solidarité dans les villages.
Et c’est cette solidarité que Mohamed Ben Abdallah Ben Arbi invoque quand il raconte l’histoire de sa zarda, celle qu’il organise à Souk el Jemmâa, qui était, à l’origine, dédiée au saint de l’époque Husseinite Sidi Hemada.
Après la révolution et les exactions violentes perpétrées par des groupes extrémistes, notamment contre des cultes considérés comme hérétiques, les “hommes de Lahemeda”, les habitants du village, ont été contraints d’arrêter cette fête aux consonances païennes. Le riche commerçant Mohamed Ben Abdallah Ben Arbi, originaire du village, y voit lui un moyen de combattre l’idéologie extrémiste.
Au travers des paroles de son organisateur et en images, voici l’histoire de la Zarda de Souk el Jemmâa.