La fuite la plus récente diffusée par la chaîne israélienne Channel12 révèle des images choquantes de soldats israéliens agressant sexuellement un détenu palestinien dans la prison Sde Teiman, tristement célèbre sous le nom de “Guantanami d’Israël”.
Cette prison tristement célèbre, à l'image d'autres dénoncées dans des rapports d’organisations, inflige aux détenus palestiniens des tortures sévères et commet des violations qualifiées de "crimes de guerre". Un rapport de B’Tselem “ Welcome to hell” (Bienvenu en enfer) révèle la situation catastrophique des prisons israéliennes depuis le 7 octobre.
Que se passe-t-il derrière les murs?
La guerre actuelle à Gaza attire une attention médiatique différente des conflits précédents. Les réseaux sociaux jouent un rôle crucial et révèles les horreurs vécues par les détenu·es palestinien·nes. Les prisons israéliennes, cependant, sont comme des boîtes noires -ce qui s’y passe reste caché jusqu’à la libération d’un·e détenu·e. Cela est particulièrement vrai compte tenu des récentes modifications législatives qui rendent presque impossible la visite des avocats et des organisations internationales.
Le témoignage de Mahmoud Bahader
Mahmoud Bahader, 65 ans, a passé sept mois et 13 jours en détention après une incursion de l’entité sioniste dans le nord de Gaza. Dès son arrestation, il a été battu puis transféré dans des baraquements, où les détenus subissent des tortures physiques et psychologiques d’une brutalité extrême, a-t-il raconté dans une interview accordée à Daraj.
“Les soldats israéliens entassaient environ 30 détenus dans chaque tente, avec environ 150 personnes répartis sur cinq tentes. Dès notre arrivée, nous étions soumis à une guerre psychologique et à des abus physiques. Aveuglés, menottés et enchaînés, la nourriture est distribuée une fois par jour seulement. Ils nous manipulaient, les soldats nous donnaient à manger et en échange, ils nous empêchaient de boire de l’eau. Les installations sanitaires étaient insuffisantes, et l’eau rarement disponible”, se souvient Bahader.
“J’ai été emmené au service de renseignement pour être interrogé. J’ai subi de graves tortures et on m’a accusé d’appartenir à une organisation, malgré mon âge avancé. Après sept séances d’interrogatoire, j’ai été transféré à la prison de Néguev, où nous étions régulièrement soumis à la torture.” poursuit-il.
Selon Bahader, les détenus étaient terrorisés par les soldats israéliens qui lâchaient des chiens sur eux alors qu’ils étaient confinés dans de petites salles fermées. Certains détenus étaient mutilés par les chiens, tandis que d’autres étaient harcelés sexuellement par les gardes, hommes et femmes.
Le témoignage de Tamer Obeid
Tamer Obeid, 31 ans, a été arrêté avec ses six frères et sa mère de 55 ans dans le quartier de Zeitoun, à Gaza.
Selon Obeid, il ont été transféré·es dans des kibboutz où on leur a fait subir des tortures brutales de la part des soldats israéliens. “Nous avons été emmenés à la prison du Néguev, où les tortures se sont intensifiées. L'un de mes frères a été torturé en se faisant insérer violemment une tige dans l'anus, ce qui a causé de graves blessures. Après notre libération, il a été immédiatement pris en charge pour un traitement, tandis que nous étions privés de soins médicaux de base dans les prisons.”
Il poursuit : “Un autre de mes frères a été traumatisé après que des soldats ont lâché des chiens sur lui dans la salle de bain. Ils l’ont mordu. Pendant ce temps, j'ai été violemment frappé à la poitrine, ce qui m'a causé des fractures aux côtes”.
L'événement le plus traumatisant qu'Obeid ait vécu a été la mort d'un vieil homme dans le centre de détention, après avoir été victime d'un viol collectif perpétré par plusieurs soldats. “Il n'a probablement pas survécu à cette épreuve”, raconte Obaid.
Le témoignage de Adnan Al-Jamasi
Adnan, originaire de Gaza, a été arrêté le 16 décembre et soumis à presque toutes les formes de torture par l’armée et les services de renseignement israéliens. Après quatre mois de torture et de mauvais traitement, il a été transféré à la prison de Néguev. Les soldats qui le torturaient parlaient couramment l’arabe. Il déclare : “L'un des gardes brûlait souvent ma barbe avec une cigarette jusqu’à ce que la peau de mon visage soit brûlée“
Les détenus peuvent-ils oublier?
Thaer Shreiteh, porte-parole de la Commission des affaires des prisonniers palestiniens, a révélé à Daraj que plus de 4 000 Palestinien·nes ont été détenu·es par l'armée israélienne pendant la guerre à Gaza, dont environ 1 500 ont été libéré·es jusqu'à présent. Il précise que la plupart de ces détenu·es sont emprisonné·es à Ofer, au Néguev, et dans d'autres prisons secrètes.
“Nos équipes et les avocats de la commission ont contacté de nombreux détenus libérés qui ont fourni des témoignages, et il est évident qu'un grand nombre d'entre eux ont été soumis à la torture, à la famine, et à des menaces de viol”, déclare Shreiteh.
“De nombreux détenus ont confirmé avoir subi des amputations sans anesthésie ni personnel médical adéquat, en plus d'avoir été terrorisés par des chiens et soumis à des agressions sexuelles avec des chiens alors qu'ils étaient ligotés. Certains détenus ont été jetés dans des pièces où se trouvaient les corps d'autres détenus”. Shreiteh souligne que ces actes de torture font partie d'une stratégie plus large visant à “se venger du peuple palestinien”.
“Crimes de guerre” et représailles contres les civil·es
Alaa Skafi, directeur de l’association Al-Dameer pour les droits de l’humain, affirme que, selon le droit international, les prisons israéliennes commettent des violations et des crimes qui constituent “des crimes de guerre”, en vertu de la Convention contre la torture, de la Quatrième Convention de Genève et d’autres normes internationales. Ces pratiques violent également la Convention contre la torture, à laquelle Israël est signataire.
“Ce à quoi les détenus sont soumis s'apparente à un ‘crime contre l’humanité’, tel que stipulé dans l’article 7 du Statut de Rome de la Cour pénale internationale, créée en 1998. Les pratiques dans les prisons israéliennes constituent également une violation de la Convention de Genève, qui régit les lois de la guerre”, affirme Al-Sakkafi à Daraj.
Un rapport d'Al-Dameer souligne que les autorités israéliennes continuent de dissimuler des informations sur les détenus tués. Des rapports ont révélé que des dizaines de détenus sont morts dans des camps et des prisons sans que leurs familles ne connaissent leur sort, et sans que les autorités pénitentiaires ne divulguent leurs noms.
Euro-Med Human Rights Monitor a exprimé sa surprise face aux affirmations contradictoires de l’armée israélienne, qui a allégué que les détenus étaient des combattants impliqués dans une attaque ultérieure et ont été libérés par la suite. L’organisation rejette ce récit; affirmant qu’il s’agit d’une excuse pour se venger des civil·es palestinien·nnes et atteindre leur dignité.
Elle confirme également que les actes de torture et les traitements inhumains infligés par l’armée israélienne constituent des “crimes de guerre” et des “crimes contre l’humanité”. L’organisation met en garde contre l’implication des civil·es israélien·nes dans de telles pratiques, considérant cela également comme un “crime de guerre”.
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