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Sandra, 24 ans, consultante dans un cabinet d’audit, 1700 dinars par mois, un prêt pour l’avenir


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25 Août 2024 |
À 24 ans, Sandra*, employée dans un cabinet d’audit et jeune diplômée, rêve de poursuivre ses études en France. Malgré les économies réalisées au fil des années, ce projet a nécessité un prêt pour financer son départ. Plongée dans son porte-monnaie. 
Chaque matin, Sandra se rend au travail au volant de sa petite voiture, qu’elle entretient avec soin. "C’est ma responsabilité, je m’assure qu’elle est toujours en bon état", dit-elle fièrement. 

Le coût du carburant, environ 160 dinars par mois, est une dépense qu'elle surveille de près. "Je fais attention à chaque dinar dépensé, même pour l'essence. Tout compte dans mon budget", avoue la jeune femme. 

Depuis un an et demi, Sandra travaille en tant que consultante dans un cabinet d’audit où elle perçoit un salaire mensuel de 1700 dinars. Elle parvient à épargner 70% de son revenu chaque mois, somme qu’elle met de côté afin de financer les frais liés à son départ à l’étranger. "Si je ne vivais pas chez mes parents, cela aurait été impossible d’épargner autant", précise-t-elle, reconnaissant que ne pas payer de loyer est un avantage majeur. 

En ce qui concerne son alimentation, Sandra bénéficie d’un soutien crucial. Grâce à sa mère, elle n’a pas à dépenser pour cuisiner ni à manger à l'extérieur. "Ma mère s’occupe de tous mes repas pour le travail, ce qui me permet d’économiser un maximum", explique-t-elle. 

"Je ne fais jamais de courses pour moi-même. Je mange ce que mes parents me fournissent. Ils m’aident énormément, ils savent que chaque dinar économisé compte."

Par ailleurs, Sandra est très stricte sur ses autres dépenses : "Je me retiens sur tout ce qui est superflu, que ce soit le maquillage, les vêtements ou d’autres plaisirs. Chaque dépense doit être justifiée". Son forfait téléphonique, pris en charge par son travail, est une autre dépense qu’elle n’a pas à assumer. "C’est un soulagement de ne pas avoir à penser à ça", confie-t-elle. 

Voici un aperçu de ses sorties et entrées d’argent mensuelles :

Alors qu’elle était encore étudiante à l’École nationale d'ingénieurs de Tunis (ENIT), Sandra a appris à jongler entre ses cours et ses petits boulots, qu'elle a exercés tout au long de son parcours académique. En plus de ses cours, elle a travaillé comme instructrice et a mis de côté les revenus de ses stages d’été. "L’été, je ne profitais pas comme mes amis. Je n’ai pas le luxe de m’amuser", raconte la jeune femme. 

Passionnée de boxe, de natation et d'activités en plein air comme la randonnée, Sandra a dû ajuster ses activités sportives pour économiser davantage. Bien qu’elle continue à pratiquer la boxe et la natation, elle a réduit la fréquence de ses séances pour diminuer les coûts associés. 

"Je fais des sacrifices pour équilibrer mon budget".  

En revanche, la randonnée reste un plaisir essentiel pour elle : "C’est vital pour moi de sortir de la ville, de respirer l'air frais et de décompresser de toute cette pression financière", confie-t-elle. Sandra consacre environ 80 dinars par mois uniquement à ces sorties en nature avec ses amies.

Voici le détail de ses dépenses et revenus mensuels :

Lorsque l'idée de partir étudier en France s'est imposée à elle, Sandra a compris l’ampleur des sacrifices nécessaires pour réaliser ce projet. "Toute ma famille a mis la main au porte-monnaie lorsque je leur ai annoncé mon départ pour la France”, raconte-t-elle. Ses parents, une infirmière et un retraité de banque, ont en effet dû contracter un prêt de 30 000 dinars pour l’aider à financer son départ. 

"Malgré tous mes efforts pour épargner le maximum, ce n’était pas suffisant. J’ai dû demander de l’aide à mes parents, je n’avais pas d’autre choix", explique-t-elle, non sans une certaine amertume. "J'ai toujours su me débrouiller seule, donc demander de l'aide a vraiment été un cap difficile à franchir", renchérit-elle. 

Zone grise 

Cependant, même avec toute cette préparation, Sandra a été confrontée à des défis inattendus. Pour obtenir son visa, elle devait justifier d’une somme de 7300 euros sur son compte ou prouver qu’elle pouvait subvenir à ses besoins avec 615 euros par mois. Ces exigences se sont avérées être une barrière presque insurmontable. "Si je n'avais pas reçu ce prêt bancaire contracté par mes parents  je n'aurais pas pu rassembler la somme nécessaire", reconnaît-elle.

Les difficultés ne se sont pas arrêtées là. Les restrictions sur les transactions bancaires depuis la Tunisie ont rendu impossible le paiement de l’acompte pour son logement en banlieue parisienne. Finalement, un ami franco-tunisien a dû effectuer le paiement depuis son compte en France, une solution temporaire à un problème récurrent.

"J’ai l’argent, mais toutes les transactions bancaires que je dois faire à distance sont un combat de tous les jours".

Futur 

Malgré les épreuves, Sandra reste résolument tournée vers l’avenir. En septembre, elle commence un master en traitement de l’information à la Sorbonne, tout en travaillant en alternance dans une entreprise à Paris. Pour elle, cette alternance est bien plus qu'une simple opportunité professionnelle ; c’est une nécessité pour financer ses études et continuer à avancer dans sa carrière.

"Ce chemin est difficile, mais je suis convaincue que cela en vaut la peine".

Sandra envisage de s’installer durablement à Paris, avec l’espoir que cette expérience lui ouvre de nouvelles perspectives professionnelles. "Partir pour la France est un vrai défi, mais c'est aussi une chance unique pour atteindre mes objectifs. C'est une étape nécessaire pour avancer dans ma carrière", résume-t-elle avec enthousiasme.