L’affaire du Sahara occidental : un conflit qui perdure

Il y a quelques jours, le secrétaire général de la Ligue des États arabes, Ahmed Abou el-Gheit, a déclaré que le conflit diplomatique sans précédent entre le Maroc et la Tunisie était résolu. Ce conflit a été déclenché lorsque la Tunisie a accueilli le leader du Front Polisario, Brahim Ghali, à la Conférence internationale de Tokyo sur le développement en Afrique (Ticad 8). inkyfada passe en revue les principaux événements de la question du Sahara.
Par | 16 Septembre 2022 | reading-duration 10 minutes

Disponible en arabeanglais
Les origines de la question du Sahara, qui oppose principalement le Maroc et le Polisario soutenu par l'Algérie, remontent aux années 1970. À cette époque, la Mauritanie faisait également partie du conflit, aux côtés du Maroc.  

Cette vaste région offre une large façade sur l'océan Atlantique, à l'ouest de l'Afrique. Elle est bordée par le Maroc au nord, la Mauritanie à l'est et au sud, et l'Algérie au nord-est. Avec une superficie d'environ 266 kilomètres carrés, le Sahara compte moins d'un million d'habitant·es.  

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Le Sahara a été sous contrôle de l’Espagne de 1884 à 1975, à la fin de la colonisation espagnole. Durant cette période, en 1973, le "Mouvement pour la libération de Seguia el-Hamra et Oued ed-Dahab" ou Front Polisario a été créé, ayant pour objectif de libérer la région et d'établir un État indépendant du Sahara occidental. Entre 1975 et 1991, un conflit militaire a opposé le Maroc au Front sur le territoire du Sahara, autrement appelé la guerre du Sahara. 

En 1974, l'Espagne annonce son intention d'organiser un référendum sur l'autodétermination du peuple sahraoui, et fixe la date dans l'année qui suit la déclaration. À la fin de l'année 1974, le Royaume du Maroc et la Mauritanie se tournent vers les Nations unies, demandant que la Cour internationale de justice rende un avis consultatif sur les terres du Sahara.

L'année suivante, la Cour est parvenue aux conclusions suivantes : Le Sahara occidental a des liens juridiques d’allégeance avec le Maroc et la Mauritanie. Cependant, à l'époque de la colonisation espagnole, il n'y avait aucun lien de souveraineté territoriale entre le Sahara Occidental d’une part, le Maroc ou la Mauritanie d’autre part.

Entre-temps, l'Assemblée générale des Nations Unies appelle à un référendum d'autodétermination dans la région, qui sera organisé sous sa supervision.   

En 1975, le roi Hassan II du Maroc a appelé son peuple à une marche pacifique vers le Sahara. Le nombre de volontaires a été fixé à 350.000, symbolisant le taux de natalité annuel au Maroc.

L'objectif de cette marche pacifique était de faire pression sur les Espagnols pour qu'ils quittent la région. Des milliers de Marocains ont répondu à l'appel du roi, et la Marche verte a été considérée plus tard comme la plus importante d'Afrique. Finalement, le contrôle marocain sur la région est imposé.  

Le 14 novembre 1975, les accords de Madrid, signés par l'Espagne, le Maroc et la Mauritanie, stipulent le retrait espagnol du Sahara occidental et le partage du territoire entre le Maroc et la Mauritanie. Le Front Polisario et l'Algérie, qui réclament la mise en place d'une République sahraouie indépendante, rejettent l'accord.  

Après la Marche verte, jugée victorieuse par le Maroc, le Front Polisario proclame en 1976 la République arabe sahraouie démocratique (RASD). Suite à cette déclaration, la guerre du Sahara éclate. Les principaux acteurs du conflit sont le Front Polisario, soutenu par l'Algérie, le Maroc et la Mauritanie.  

La Mauritanie s'est retirée du conflit à la suite du coup d'État militaire de 1978 qui a conduit au renversement de son président, Moktar Ould Daddah. Le pays a ensuite signé un accord de paix avec le Polisario, renonçant à la zone sous son contrôle, et a ensuite adopté une position neutre sur la question.  

Le conflit armé entre le Polisario et le Maroc dure plus de 15 ans. En 1991, les deux parties signent un cessez-le-feu sous l'égide des Nations unies et adoptent un plan visant à résoudre le conflit. Cet événement marque la fin de la guerre.  

Le cessez-le-feu entre en vigueur en 1991, sous la supervision d'une mission de l'ONU (MINURSO*). Le Maroc accepte d'organiser un référendum sur l'autodétermination de la région saharienne, et les Nations unies prennent plusieurs mesures à cet effet. Cependant, le référendum est constamment reporté.  

Les propositions internationales visant à résoudre le conflit ne font pas l'unanimité et ne sont pas approuvées par les parties concernées. Alors que le royaume accepte la large autonomie sous direction marocaine, le Front Polisario refuse un tel accord. 

Comme le référendum aboutira finalement à l'adoption de l'une des deux options suivantes : l'adhésion du Sahara au Maroc, option rejetée par le Polisario, ou l'établissement de la République arabe sahraouie démocratique, à laquelle le Maroc s'oppose, aucun consensus n'est atteint entre les parties.  

Les négociations entre le Polisario et le Maroc reprennent en 2007 à New York, ni celles-cis, ni celles qui suivent ne réalisent un progrès, elles sont alors suspendus. En 2017, elles reprennent encore une fois. Genève a accueilli, en 2019, en présence des ministres des Affaires étrangères du Maroc, de l’Algérie et de la Mauritanie, ainsi qu’un représentant du Polisario, un nouveau cycle de négociations.  

En 2007, les négociations entre le Polisario et le Maroc reprennent à New York. Ce cycle, ainsi que ceux qui ont suivi, ne débouchent sur rien. Les négociations sont alors suspendues en 2012, pour finalement être rouvertes en 2017.  

Deux ans plus tard, un cycle de négociations est organisé par l'ONU à Genève pour discuter de la question du Sahara Occidental. Les ministres des affaires étrangères du Maroc, de l'Algérie et de la Mauritanie, le représentant du Polisario et l'envoyé de l'ONU chargé de l’affaire participent à cette table ronde, mais ne parviennent pas à convenir d'une solution finale au conflit.

L'Algérie soutient le Polisario et reconnaît la République arabe sahraouie. Elle appuie cette reconnaissance auprès d'autres pays et d'organisations internationales. Par conséquent, les relations entre le Maroc et l'Algérie sont tendues depuis des décennies. Les deux pays échangent parfois des accusations de temps à autre, voire rompent leurs relations.  

Si l'Algérie affirme que son soutien au Polisario découle de sa croyance dans le droit à l'autodétermination, et de son soutien à tous les mouvements de libération dans le monde, la particularité géographique du Sahara reflète des intérêts politiques et une certaine détermination du pouvoir sur le plan régional. Selon les estimations du Gouvernement algérien, et le site web du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), environ 165 000 réfugiés sahraouis vivent dans les camps à proximité de la wilaya frontalière de Tindouf. 

Actuellement, 80% du Sahara occidental est sous l'administration marocaine, et est appelé "Provinces du Sud". Le reste est sous le contrôle du Polisario. Le Maroc ne tolère aucune opinion susceptible de porter atteinte à sa souveraineté sur le Sahara ou de contredire sa position sur la question.  

Lors de la récente crise diplomatique entre la Tunisie et le Maroc, le royaume a fait part de sa désapprobation. Les deux pays rappellent alors leurs ambassadeurs respectifs, et Rabat fait savoir que son équipe ne participera pas au championnat nord-africain de karaté organisé à Tunis. D'autres pays ont été confrontés à une crise similaire, notamment l'Arabie saoudite en 2019, suite à un reportage diffusé par Al Arabiya qui remettait en cause la position du Maroc sur la question du Sahara. 

En 2016, le Secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a utilisé le terme "occupation" pour parler de l'annexion du Sahara au Maroc. Le royaume a alors exigé le retrait de dizaines de ses fonctionnaires de l'ONU, ce qui a poussé le secrétaire général à présenter des excuses suite au malentendu survenu suite à ses déclarations.

Le Maroc s'est également retiré de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) en 1984, en raison de l'admission de la RASD. Il a réintégré l'Union africaine en 2017, après 32 ans.  

Les Nations unies considèrent le Sahara comme un territoire non autonome.