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Marlies, 73 ans, retraitée allemande vivant à Djerba, 2950 dinars par mois


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03 Juillet 2022 |
En Allemagne, Marlies avait du mal à payer ses factures et devait travailler pour joindre les deux bouts. Après neuf ans de difficultés financières, elle a décidé de s'installer en Tunisie, espérant que sa situation s'améliorerait.

Chaque matin, Marlies commence par nourrir son chien et ses cinq chats. Elle s’occupe ensuite des chiens errants qui vivent devant chez elle et dans le lagon voisin. Ce n'est qu'après avoir fait tout cela qu'elle prend son petit-déjeuner et poursuit sa journée à Djerba, où elle vit dans une petite maison.

Originaire de Stuttgart, dans le sud de l'Allemagne, Marlies a aujourd'hui 73 ans. À part s'occuper de ses animaux, elle n'a pas d'autres obligations.  

Cependant, sa vie n'a pas toujours été aussi calme. "J'ai commencé à travailler à l'âge de 15 ans, puis j'ai arrêté de travailler pendant sept ou huit ans à la naissance de ma fille, et après, j'ai repris le travail", raconte-t-elle à inkyfada. 

Marlies a été mariée pendant 36 ans. Pendant cette période, elle a eu une bonne vie, selon elle. Toutefois, après son divorce, elle s'est retrouvée livrée à elle-même, la vie est alors devenue plus difficile et l'argent plus rare.  

À 60 ans, Marlies a alors pris sa retraite. La pension qu'elle recevait à l'époque s'élevait à 800 euros (environ 2 600 dinars*) par mois, une somme insuffisante pour mener une vie confortable en Allemagne. Le loyer mensuel lui coûtait 550 euros (1 790 dinars) et après avoir réglé toutes les autres factures, il ne lui restait que 120 euros (390 dinars) pour la nourriture et les autres nécessités. 

Sa pension ne suffisait pas à couvrir ses frais, Marlies a dû continuer à travailler quelques heures par semaine, même après avoir pris sa retraite. "Je gagnais 450 euros de plus chaque mois, et avec cela, j'ai réussi à me permettre de vivre sans avoir à trop me soucier de l'argent", dit-elle, "mais à un moment donné, on aimerait aussi arrêter de travailler, n'est-ce pas ?".  

Pour concrétiser son vœu, Marlies a décidé de quitter l'Allemagne et de s'installer à Djerba, en Tunisie, en 2017. Elle avait déjà visité l'île auparavant et avait une amie qui y louait de petites maisons. “Elle m'a dit : ‘viens ici, j'ai des maisons, tu peux en louer une et mener une belle vie’ donc je l'ai fait", raconte-t-elle. Elle a fait ses valises, expédié ses meubles à Djerba et quitté l'Allemagne avec son chat.   

Pendant toutes les années où elle a travaillé en Allemagne, Marlies a cotisé à son assurance retraite. Cependant, étant seule, elle ne parvenait pas à vivre dans son pays avec la pension qu’elle perçoit. Selon elle, quitter sa terre natale était le seul moyen de profiter de sa retraite sans devoir continuer à travailler. 

"À mon avis, chaque retraité devrait recevoir suffisamment d'argent pour joindre les deux bouts, pour vivre tout simplement", dit-elle, "chaque retraité devrait recevoir quelques centaines d'euros de plus pour pouvoir se permettre de vivre en Allemagne. Sinon, de plus en plus de gens partiront".

En Tunisie, elle a tout ce dont elle a besoin, dit Marlies. Elle a une maison qu'elle loue, un grand jardin, ses animaux de compagnie et ses amies qui viennent toutes d'Allemagne aussi. Elle reçoit maintenant une pension de 907 euros par mois, ce qui équivaut actuellement à environ 2950 dinars. Avec cela, elle peut se permettre de bien vivre et d'économiser environ 1000 dinars chaque mois.

Voici un aperçu de ses revenus et dépenses mensuelles :

Pour la location de sa petite maison, Marlies paie 500 dinars par mois à son amie. Tous les deux mois, elle doit payer sa facture d'électricité, qui s'élève à environ 130 dinars pendant les mois où elle utilise beaucoup la climatisation, et à environ 45 dinars les mois où elle ne l'utilise pas. Sa facture d'eau est due tous les trois mois et s'élève généralement à 30 dinars. Pour son forfait internet mobile et wifi, Marlies paie 25 dinars par mois. Si elle vivait dans un appartement de 60 mètres carrés dans sa ville natale de Stuttgart, elle paierait au moins 1100 euros (environ 3575 dinars) pour le loyer, l'électricité, le gaz, l'internet et son forfait téléphonique, ce qui représente une augmentation d'environ 3000 dinars par rapport au budget qu'elle y consacre en Tunisie.

Marlies se déplace sur l'île en voiture. Pour sa voiture, elle doit payer 600 dinars pour l'assurance, en plus de 60 dinars pour la taxe de circulation chaque année. Environ une fois tous les trois mois, elle doit également l’amener au garage pour de petites réparations. Cela lui coûte généralement 80 dinars. Marlies ne sait pas vraiment combien elle paie pour le carburant chaque mois, car la jauge de sa voiture est cassée, ce qui signifie qu'elle ne sait jamais si son réservoir est plein - ou vide. Pour cette raison, elle se rend à la station-service environ deux fois par mois et leur demande de faire le plein. Si le réservoir de sa voiture est vide, elle paie environ 75 dinars, sinon, elle paie moins.

Marlies commence ses journées en nourrissant ses animaux de compagnie et en se rendant au lagon où elle nourrit également les chien·nes qui y vivent. Les chats reçoivent de la nourriture pour chats et les chiens de la nourriture sèche mélangée avec des pâtes et de la viande que le boucher local lui donne parce qu'il ne peut plus la vendre. Pour la nourriture des animaux, Marlies paie environ 300 dinars par mois.   

Après avoir nourri les animaux, Marlies rentre chez elle pour prendre son petit-déjeuner. Ensuite, elle se rend généralement au supermarché. Chaque semaine, elle dépense environ 100 dinars chez l'épicerie et au supermarché. Marlies estime qu'elle ne dépense qu'environ cinq dinars par mois en produits cosmétiques, car elle n'a besoin que de son rouge à lèvres et de sa crème pour le visage.  

Lorsqu'elle rentre chez elle après avoir fait les courses, Marlies aime faire du crochet, des mots croisés, lire un livre, jardiner ou promener son chien. Elle se réunit parfois avec ses ami·es dans un café ou à la maison. Quatre ou cinq fois par mois, Marlies mange au restaurant où elle paie généralement entre 15 et 20 dinars. Environ une fois par semaine, elle va à la plage où elle doit payer cinq dinars pour avoir une chaise longue. De temps en temps, elle fait des excursions d'une journée sur le territoire tunisien avec sa voiture. Elle rentre toujours le soir même pour prendre soin de ses animaux.

Presque chaque vendredi matin, Marlies se rend à la friperie locale, où elle aime fouiller dans les montagnes de vêtements, dépensant généralement 10 à 20 dinars à chaque fois. "C'est là que je trouve toujours les meilleurs vêtements ou chaussures", dit-elle en riant. Une ou deux fois par an, elle s'offre également de nouvelles décorations pour sa maison : un nouveau tapis, un petit pilier décoratif ou de nouvelles plantes, et dépense généralement environ 85 dinars.  

Chaque mois, Marlies économise environ 1 000 dinars pour faire face à des dépenses imprévues, comme une visite chez le médecin ou à l'hôpital ou une réparation de voiture. Elle a une assurance maladie en Allemagne qui est directement déduite de sa pension. Marlies ne sait pas combien elle paie pour cette assurance, mais elle peut obtenir un remboursement allant jusqu'à 200 dinars par an pour les frais médicaux en Tunisie. Ses frais médicaux varient en fonction de sa maladie ou du traitement médical nécessaire. L'année dernière, Marlies a dépensé environ 260 dinars en traitements médicaux, Elle en a récupéré 130 dinars, remboursés par son assurance maladie.  

Voici le détail de ses entrées et sorties d’argent mensuelles :

Zone grise 

Si Marlies a l'air très occupée lorsqu'elle raconte sa semaine, elle est parfois triste que les activités de loisirs ne soient pas nombreuses sur l'île. " Il n'y a pas de cinéma, pas de culture, il n'y a rien ici sur l'île", dit-elle. 

Depuis ses cinq années de vie en Tunisie, elle n'est jamais retournée en Allemagne et, à cause de la pandémie, elle n'a pas non plus pu recevoir de visites d'Allemagne au cours des deux dernières années et demie. Cependant, sa fille, sa petite amie et son petit-fils lui rendront peut-être visite bientôt.

Marlies dit qu'elle n'a pas de soucis financiers en Tunisie et qu'elle est heureuse ici. "Si je dois amener ma voiture chez le réparateur, j'ai des soucis financiers ! ", dit-elle en riant, "mais tout va bien".  

Future 

Marlies ne pense pas qu'elle retournera vivre en Allemagne un jour. "Avec l'argent que j'ai, je ne pourrais jamais vivre en Allemagne", dit-elle. "J'ai complètement éliminé cette possibilité et je dois aussi dire que plus rien ne me rattache à l'Allemagne". Si elle touchait trois ou quatre fois la somme d'argent qu'elle a actuellement, elle pourrait probablement déménager dans un autre pays, comme l'Italie ou la Turquie.

"Mon seul vœu est de rester en bonne santé pour prendre soin de mes animaux.", déclare Marlies à propos de son avenir.